Depuis le dernier Éditaux :
- Le taux de l’OAT 10 ans a gagné 7 bp à 0,80 %, oscillant entre 0,60% et 1% depuis plus d’un an
- Les indices actions sont globalement stables
- l’EUR/USD a fortement chuté (1,18 vs 1,24) et rejoint son plus bas de l’année
- L’Eonia et l’Euribor 3 mois, dirigés par la politique monétaire de la BCE, sont stables (respectivement -0,36% et -0,33%)
Corée du Nord : Guerre et Paix, le bruit médiatique
Souvenez-vous : il y a 6 mois, les médias jouaient à se faire peur en imaginant différents scénarios de crise entre les deux Corées. Crise diplomatique, course à l’armement, guerre nucléaire : tous les scénarios étaient bons pour vendre du papier !
Tout récemment, conte toute attente, Kim Jong Un a affiché son intention de mettre son pays sur la voie d’une paix durable avec la Corée du Sud.
Comme nous l’évoquions dans l’Éditaux d’octobre 2017, il est vain d’écouter le bruit médiatique pour prendre des décisions de placement… et encore plus vain d’essayer d’anticiper la politique internationale !
Les divergences monétaires entre États-Unis et zone euro renforcent le dollar
La réserve Fédérale américaine se réunit 8 fois par an pour décider de politique monétaire. Sur ces 8 réunions, 4 font l’objet d’une conférence de presse (Mars, Juin, Septembre, Décembre) : ce sont en général celles où sont prises les décisions sur les taux directeurs.
La réunion du 2 mai n’a pas donné lieu à de changements de taux, mais Jerome Powell a réaffirmé que l’économie américaine était robuste, que l’inflation lui semblait en bonne voie pour atteindre la cible des 2%, et que le marché anticipait correctement sa politique.
Autrement dit, la Fed est bien aux avant-postes de la normalisation monétaire. Le consensus de marché table désormais sur 3 hausses des taux à venir en 2018, ce qui nous amènerait à la fourchette 2,25%-2,50% en fin d’année (contre 1,50%-1,75% actuellement).
Cette fermeté réaffirmée a renforcé le dollar, surtout face à l’euro dont la rémunération est toujours nulle.
La courbe des taux américaine s’aplatit encore et encore
Nous avons déjà évoqué le concept de pente de la courbe des taux. La pente est l’écart entre le taux actuariel d’une obligation de maturité courte (2 ans par exemple) et celui d’une obligation plus longue (10 ans) à un instant donné.
Elle reflète l’excédent de rendement que demande un investisseur pour supporter le risque d’une obligation à 10 ans.
Lorsque les taux courts grimpent, comme c’est le cas actuellement aux États-Unis, la pente a tendance à s’aplatir, car les taux longs ne montent pas aussi rapidement. Depuis le début d’année, c’est même pire : les taux longs sont orientés à la baisse, accélérant l’aplatissement de la pente !
Une pente faible signifie en général que le marché anticipe un ralentissement de l’économie.
En effet, puisque les investisseurs acceptent de bloquer le même taux pendant 10 ans plutôt que de replacer à 2 ans, cela signifie qu’ils anticipent, au choix :
- une baisse prochaine des taux courts
- une période économique peu favorable
- des transferts des actions vers les obligations (flight to quality).
La Fed de Saint-Louis nous propose un graphe historique de la pente 2-10 ans sur le marché US. Les zones grisées représentent les récessions.
(Source : https://fred.stlouisfed.org/series/T10Y2Y#0, n’hésitez pas à « jouer » avec le graphique !)
Dans une étude récente, la Fed de San Francisco a compilé 50 ans de données et conclut que 100% des récessions aux US ont été précédées d’une courbe inversée, tandis que le signal n’a donné qu’un seul faux positif (ralentissement mais pas récession). Il s’agit donc d’un très bon indicateur économique.
Aujourd’hui, avec un taux 2 ans à 2,53% et un 10 ans à 2,95%, la courbe des taux US est faiblement pentue. Après 3 hausses de taux courts, elle sera probablement plate (tout dépendra aussi du mouvement des taux longs), annonçant une fin de cycle dans les 2 ans… ce qui nous laisse du temps !
Quelles anticipations pour la prochaine réunion BCE ?
La prochaine réunion de politique monétaire de la Banque Centrale Européenne se déroulera le 14 juin.
La tâche reste difficile pour la BCE. D’un côté, elle doit sortir des politiques ultra-accommodantes devenues non nécessaires, voire néfastes. De l’autre elle doit composer avec des contraintes qui limitent sa marge de manœuvre : inflation toujours faible, force de l’euro malgré une rémunération nulle, risque d’un retournement économique…
La faiblesse récente de l’euro lui donnera un peu de latitude pour raffermir son discours, tandis que la vigueur de l’économie mondiale permet de dissiper la crainte d’un retournement immédiat, et ouvre donc la voie à un évocation de hausse des taux, même lointaine. Mais le difficile consensus entre gouverneurs limitera nécessairement le volontarisme de son discours, puis l’ampleur de son action.
Lors de la prochaine réunion, nous attendons des éclaircissements sur l’avenir de la politique de rachat d’actifs, car les taux courts ne peuvent progresser tant que cette opération n’est pas achevée. Côté taux longs, nous estimons toujours qu’ils ne peuvent connaître qu’une hausse très limitée d’ici la fin de l’année.
Comment placer sa trésorerie dans cet environnement ?
Les comptes à terme constituent toujours la meilleure opportunité si vous êtes en recherche d’un placement liquide et rémunérateur.
Sur des horizons plus longs, les SCPI/OPCI, l’immobilier dit « pierre-papier » offrent une prime de risque (écart avec le taux sans risque) excellente.
En cas de stabilité des taux longs, leur rendement élevé permet un portage durablement favorable.
En cas de hausse des taux longs causée par l’inflation, l’indexation des loyers leur offrira une belle résilience.
C’est un moyen indirect de profiter de l’écart entre taux courts et taux longs !