Depuis le dernier Éditaux, les taux courts restent stables tandis que les taux longs se tassent légèrement.
- Eonia : -0,36% (+2 bp)
- Euribor 3 mois : -0,31% (stable)
- Euribor 6 mois : -0,23% (stable)
- OAT 10 ans : 0,34% (-5 bp)
Trump augmente les droits de douane…
Après une longue escalade rhétorique (toujours sur Twitter !) et des négociations incertaines, Trump est passé à l’acte : depuis le vendredi 10 mai, les droits de douane sur des milliers de produits chinois représentant un volume de 200 milliards de dollars ont été relevés de 10 % à 25 %, tandis que Pékin a déjà promis des représailles.
En conséquence directe, les actions ont été particulièrement chahutées. Les grands indices boursiers ont perdu environ 4 % sur leurs plus hauts en quelques jours. Contrastant avec le rebond connu depuis le début d’année, les fonds actions ont connu une décollecte majeure. La décollecte depuis le début de l’année atteint 116 milliards de dollars, se rapprochant de celle observée lors de deux autres très mauvais débuts d’année (155 milliards de dollars en 2008 et 151 milliards en 2016), selon EPFR Global, société de recherche spécialisée dans le suivi des flux des sociétés de gestion internationales.
Côté taux, c’est surtout la « fuite vers la qualité » qui prévaut. Les craintes sur un tassement de la croissance mondiale alimentent les anticipations d’une baisse des taux et incitent les investisseurs à privilégier la sécurité de l’obligataire : le taux des obligations à 10 ans émises par l’État français n’a pas pu se maintenir durablement au-dessus de 0,40 % et stagne à 0,34 %.
… et fait pression sur la Réserve Fédérale !
Donald Trump n’a pas que la Chine dans son viseur. Il est tout aussi revendicatif sur les taux, en insistant pour que la Fed amène son taux directeur vers 1,5 % (plutôt qu’une fourchette comprise entre 2,25 % et 2,5 % actuellement) pour doper la croissance, dans un contexte où l’inflation, principal risque des politiques de taux trop généreuses, reste très faible.
Selon les données extraites par l’outil Fed Rate Monitor du CBOE (bourse de Chicago où se négocient les options), qui utilise les prix de marché pour estimer la probabilité implicite des taux d’intérêt futurs, la Fed devrait baisser son taux directeur une fois d’ici la fin de l’année, ou, en scénario alternatif, maintenir un statu quo. En revanche, tout potentiel de hausse est désormais exclu des anticipations. Les déclarations des officiels de la Fed confirment que l’interprétation de marché est alignée avec leur propre scénario.
Relancer l’inflation, casse-tête permanent
Au-delà des taux d’intérêt, la problématique est toujours celle de l’inflation.
Les Banques Centrales cherchent des solutions alternatives pour relancer l’inflation. Pour ne pas brusquer les marchés et avouer que les méthodes du passé ne fonctionnent plus, elles doivent s’y prendre avec précaution.
La Fed a laissé fuiter la possibilité d’utiliser son bilan pour acheter des titres courts et piloter le taux à 1 an. C’est un système proche de celui utilisé au Japon depuis des années (mais sur une partie bien plus longue de la courbe des taux). L’idée d’une « japonisation » des économies occidentales, avec des taux nuls et une inflation nulle, devient de moins en moins extravagante !
En Zone Euro, nous avions déjà évoqué dans le précédent Éditaux une possible application graduée des taux négatifs. Elle éviterait aux petits déposants à la BCE une trop forte charge financière, tout en restant dissuasive.
La difficile succession de Mario Draghi à la tête de la BCE
D’autres propositions sont plus structurelles. Le Finlandais Olli Rehn, membre du conseil des gouverneurs de la BCE et candidat à la tête de l’institution, propose ainsi de lancer une réflexion profonde sur le mandat et les leviers d’action de la BCE, alors qu’aucun stimulus ne semble efficace pour relancer l’inflation.
Pour l’instant, l’idée n’est pas vraiment développée. Olli Rehn, challenger, loin derrière le Français Villeroy de Galhau ou le Finlandais Liikanenen, en fait surtout un élément de différenciation de sa candidature. Mais, quel que soit le nouveau président de l’institution en novembre 2019, le renouvellement quasi simultané de nombreux postes au sein de l’État-Major de la BCE pourrait être l’occasion idéale de remettre à plat certains principes de politique monétaire, voire d’entériner des pratiques initialement qualifiées d’exceptionnelles et faisant désormais partie de l’arsenal traditionnel.
Quelle direction pour les taux de la zone euro ?
La position actuelle dans le cycle économique, les incertitudes toujours fortes sur le Brexit, le conflit commercial entre les États-Unis et la Chine, les élections européennes, la corrélation avec le cycle monétaire américain et le renouvellement à la BCE pointent dans une seule direction : aucune remontée des taux européens n’est à attendre au moins jusqu’au premier trimestre 2020.
D’ici là, la politique monétaire a davantage de chances de surprendre à la baisse qu’à la hausse !
Comment placer la trésorerie ?
Pour échapper aux taux négatifs, il faut aller chercher le rendement là où il se trouve. Pour la trésorerie courante, les comptes à terme restent des produits de choix.
Ils rémunèrent correctement malgré un environnement très défavorable, car les normes prudentielles contraignent les banques à diversifier leurs sources de financement.
Elles sont donc prêtes à payer plus cher que les taux de marché pour attirer certains types de déposants.
Les taux ne sont bien sûr pas extravagants, mais dans l’environnement actuel, ils restent très satisfaisants : sachez en profiter !
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