La guerre en Ukraine a bousculé les marchés. Les tendances de début d’année sont néanmoins confirmées : hausse de l’inflation, banques centrales plus restrictives et hausse des taux.
Depuis le 24 février, les marchés financiers vivent au rythme du conflit en Ukraine. Les actions, tout comme les obligations, ont connu une importante volatilité.
Deux phases de marché distinctes depuis le début de la guerre
Du côté des actions, l’impact baissier s’est initialement concentré sur les marchés européens. En France, le CAC 40 a perdu jusqu’à 15% entre la veille du conflit (23 février) et son point bas du 7 mars en séance. Le S&P 500 américain n’a quant à lui perdu que 0,6% sur la même période, les marchés américains ayant fait office de refuge pour les investisseurs. En parallèle, jusqu’au 7 mars, les taux se sont repliés sur les segments les plus sûrs du marché obligataire, les investisseurs considérant que le conflit pourrait amener les banques centrales à se montrer plus modérées dans leur resserrement monétaire à venir.
Un tournant a toutefois eu lieu sur les marchés à partir des 7 et 8 mars, avec l’annonce d’un boycott total des hydrocarbures russes de la part des États-Unis. Dès lors, les prix de l’énergie ont bondi, le pétrole revenant momentanément à des niveaux proches de 140 dollars/baril. Les cours des matières premières agricoles ont également connu une nette progression. Ce choc a ravivé le scénario d’une forte inflation et la nécessité, pour les banques centrales, de remonter leurs taux directeurs pour maîtriser la hausse des prix. Aux États-Unis, la Fed a ainsi procédé le 16 mars à sa première hausse de taux depuis décembre 2018.
Depuis le 7 mars, les taux des marchés obligataires ont donc repris le chemin de la hausse. Le taux d’emprunt français à 10 ans dépasse de nouveau 1%, au plus haut depuis quatre ans1, alors qu’il était encore négatif en décembre. Aux États-Unis, le taux à 10 ans s’approche de 2,5%, son plus haut niveau depuis trois ans. L’absence d’une nouvelle escalade de tensions entre la Russie et l’OTAN a permis aux actions de reprendre également le chemin de la hausse : le CAC 40 a ainsi rebondi de plus de 13% depuis son point bas du 7 mars1.
Des perspectives focalisées sur l’inflation
À court terme, la situation économique reste incertaine. Outre la gravité de la guerre en elle-même et le risque toujours présent d’une escalade des tensions avec l’OTAN, peu de données permettent jusqu’à présent d’estimer l’impact du conflit sur la croissance européenne. L’économie française était peu exposée au commerce avec l’Ukraine et la Russie, contrairement à l’Allemagne, mais les impacts indirects de la guerre sont notables, notamment via la hausse du coût des matières premières.
L’exécutif européen est mobilisé pour limiter la facture énergétique des ménages et des entreprises, mais les changements structurels envisagés pour réduire la dépendance aux hydrocarbures russes constituent des projets de long terme et ne sauraient répondre dans l’immédiat à une éventuelle rupture des livraisons de gaz en provenance de Russie. À noter toutefois que l’Europe sort de l’hiver et va désormais connaître un fort recul saisonnier de sa demande de gaz et d’électricité, ce qui pourrait permettre d’apaiser les tensions à court terme sur le plan énergétique.
Malgré l’intervention des États pour absorber une partie du choc, l’inflation reste attendue en nette hausse au cours des prochains mois, alors qu’elle se trouve à des niveaux déjà élevés. En février, les prix à la consommation ont progressé de 5,9% sur 12 mois en zone euro et de 7,9% aux États-Unis. L’accélération de l’inflation pousse les banques centrales à agir rapidement : les investisseurs anticipent désormais 8 hausses de taux de la Fed en 2022 (de 0,25% chacune), et 1 à 2 hausses de taux de la BCE. On notera que la BCE se trouve dans une situation particulièrement inconfortable, tiraillée entre deux objectifs diamétralement opposés : d’une part remonter ses taux pour contrer l’inflation, d’autre part rester au chevet des États pour absorber, via son plan de « quantitative easing », une partie de leurs nouvelles dépenses.
Pour les investisseurs à la recherche de placements de trésorerie, on notera que la hausse des taux devrait se traduire par des placement « sans risque » progressivement mieux rémunérés (à l’instar du Livret A pour les particuliers, dont le taux a été revalorisé). Ces rendements resteront très inférieurs à l’inflation cette année, soulignant l’importance, pour les investisseurs, d’allouer, quand ils le peuvent, une partie de leur trésorerie vers des placements de plus long terme, mieux rémunérés.
1 Données à la clôture du 25 mars 2022.