Les entreprises dites « cycliques », au premier rang desquelles se trouvent les banques, les valeurs industrielles et l’automobile, peinent à suivre le rebond des marchés. Malgré une conjoncture plus favorable, leurs valorisations boursières restent relativement faibles. À tort ou à raison ?
Sur les marchés actions, il est devenu traditionnel d’opposer les valeurs « cycliques » aux valeurs dites « de croissance ». Les premières ont pour caractéristique d’avoir une activité et une profitabilité dépendante du cycle économique, sur des marchés souvent « traditionnels ». Les valeurs « de croissance » sont au contraire tournées vers l’innovation, le numérique ou les marchés en fort développement (luxe, énergies vertes) et connaissent une croissance rapide de leur chiffre d’affaires. Depuis plusieurs années, les investisseurs se tournent massivement vers ces dernières, au point de délaisser les valeurs « traditionnelles ». Si certaines décotent se justifient, d’autres peuvent en revanche constituer des opportunités d’investissement pour les investisseurs de long terme.
Banques : un secteur en pleine mutation
Le secteur bancaire a été l’un des plus vulnérables face à la crise du Covid-19. Malgré le soutien économique des États et des banques centrales, plusieurs établissements ont connu un exercice 2020 déficitaire (Société Générale, Commerzbank en Europe) ou ont vu leurs bénéfices chuter lourdement (Wells Fargo aux États-Unis). L’heure est désormais au retour à la profitabilité, mais le rebond boursier des banques est resté tardif et prudent. Ainsi, à titre d’exemple, BNP Paribas, malgré des profits de 7 à 8 milliards d’euros par an (y compris en 2020), vaut 70 milliards d’euros en bourse, tandis qu’un groupe comme LVMH, qui dégage des profits comparables (5 à 7 milliards d’euros par an), est valorisé 330 milliards d’euros (au 25 octobre 2021).
La décote des valeurs bancaires est principalement liée au sentiment d’incertitude dans lequel évolue le secteur : taux bas pesant sur les marges de crédit, réglementation croissante, concurrence des Fintechs et des GAFA, voire un excès de personnel dans un monde bancaire désormais plus digital. Il n’en reste pas moins que certains établissements restent très profitables et peuvent verser des dividendes de plus de 5% par an malgré un cours de bourse volatil.
Secteur automobile : une malchance à répétition
Le secteur automobile joue de malchance depuis la crise du Covid-19. Après une année 2020 particulièrement difficile, où les ventes de véhicules ont connu une chute historique dans la plupart des pays du monde, les constructeurs font désormais face à la pénurie mondiale de composants électroniques (semi-conducteurs). Le groupe Renault a ainsi averti que cette pénurie l’a empêché de produire 170.000 véhicules au troisième trimestre, et que la perte de production sur l’ensemble de l’année 2021 devrait être de 500.000 véhicules. De même, Stellantis (Peugeot-Fiat-Chrysler) a suspendu le 18 octobre l’activité d’une usine située à Vienne (Autriche) jusqu’au 31 décembre, faute de disposer des composants nécessaires à l’assemblage de ses véhicules.
Malgré cette crise passagère, qui pèse de nouveau sur le cours de bourse des constructeurs, le secteur automobile se trouve dans une situation globalement favorable : forte demande de la clientèle, écoulement rapide des stocks de 2020 et retour à la profitabilité malgré certaines disparités. Le retour à meilleure fortune du secteur est donc sur la bonne voie. À noter, dans ce paysage, le parcours très atypique de Tesla, ayant construit son image de marque autour de la voiture autonome et électrique. La société, considérée comme une valeur de croissance et non comme une valeur cyclique, a connu un parcours boursier tonitruant : avec une capitalisation boursière de 900 milliards de dollars (au 25 octobre 2021), la société d’Elon Musk vaut plus que l’ensemble des autres constructeurs automobiles réunis. Au risque de subir, à l’avenir, le contre-coup d’une spéculation déconnectée des fondamentaux.
Valeurs industrielles : le défi du développement durable
Enfin, les valeurs industrielles cotées, principalement présentes sur les secteurs du pétrole, du gaz, de la sidérurgie et plus généralement des matières premières, constituent un cas de figure encore à part. Alors que les prix des matières premières avaient chuté en 2020 (pétrole notamment), la forte reprise économique observée partout dans le monde se traduit désormais par l’effet inverse. Ainsi les cours du pétrole dépassent de nouveau 80 dollars/baril, au plus haut depuis 2014. En Europe, la crise de l’énergie pousse également le gaz à des niveaux records. Les métaux, eux aussi très recherchés, ont également vu leur cours bondir, à commencer par le cuivre, le zinc et l’acier.
Ce mouvement a globalement profité aux valeurs présentes sur ces secteurs, sans toutefois que leur cours de bourse ne reflète cette envolée des prix. Les investisseurs restent en effet de plus en plus à l’écart de ces sociétés : les politiques d’investissement durable, en fort développement, s’interdisent souvent de prendre part à ces industries polluantes. Conscientes de cette problématique, les entreprises concernées sont pourtant nombreuses à opérer un tournant stratégique à 180°C pour s’éloigner des énergies fossiles et se tourner vers des énergies propres, en particulier dans le secteur pétrolier. Ce virage reste peu valorisé en bourse à l’heure actuelle, et confère aux entreprises du secteur énergétique un profil particulier, avec des versements de dividendes de l’ordre de 5% par an, semblables à ceux offerts par le secteur bancaire.
Cet article d’analyse ne constitue en aucun cas un conseil d’investissement. Les performances passées ne préjugent pas des performances futures.